Quʼy a-t-il sous le tapis ? L’image et ses fantômes
C’est en reprenant la question de Thomas Huber dans son discours intitulé Séance – « Quʼy a-t-il sous le tapis ? » – que je propose d’étudier la manière dont cet artiste entend étonnamment transporter son public dans son œuvre. De même qu’il assimile dans son tableau du même nom, Séance, peint en 2009, le tapis qu’il y a représenté à un tableau dans le tableau, c’est toute son œuvre et le discours qui l’accompagne qui s’apparentent réciproquement à un tapis.
Thomas Huber, Séance, 2009. Huile sur toile, 120 x 140 cm, collection particulière, GenèveLa description qu’il en donne rappelle en ce sens la nouvelle d’Henry James, « L’image dans le tapis[1] », dans laquelle le romancier conjecture une allégorie de la création littéraire qu’il compare à un motif complexe dessiné dans un tapis oriental : flagrant et dissimulé, visible et invisible à la fois. Tel qu’il se présente en médium, il s’agit pour Thomas Huber de convier son public à assister à une représentation à l’occasion d’une réunion de spiritisme. Comment accéder à la signification de son œuvre en l’absence de la lecture qu’il donne face au public venu pour l’occasion ? Le prendrait-on pour un prestidigitateur, un illusionniste, voire un escamoteur à l’instar de celui que dépeint Jérôme Bosch en détaillant le tour de passe-passe d’un magicien officiant devant des badauds frappés de stupeur ? Tandis que les mots de Thomas Huber invitent chacun à regarder derrière les apparences, comme pour passer sous un tapis et observer ce qui s’y cache, la fiction qu’il dépeint se défend de vouloir leurrer quiconque dans l’espoir de lui permettre plutôt de vivre une expérience déconcertante. Pour en arriver à cette dernière conclusion, je proposerai de frotter le concept d’étrangisation cher à Victor Chklovski[2] aux notions d’imagination, de jeu cinétique et de pulsion scopique que croise, non sans un certain humour, la démarche de Thomas Huber au travers de nombreuses citations dialogiques. C’est le 18 mars 2010 que Thomas Huber a donné pour la première fois sa conférence à l’occasion du vernissage de l’exposition Sauve qui peut à la galerie Skopia à Genève.
Thomas Huber lors de la conférence « Séance » à l’occasion du vernissage de l’exposition Sauve qui peut à la galerie Skopia à Genève, le 18 mars 2010Le texte de Séance figure à la toute fin du volume Mesdames et Messieurs publié en 2012 aux éditions du musée d’Art moderne et contemporain de Genève réunissant l’ensemble de ses conférences de 1982 à 2010[3]. Sa lecture à haute voix n’invite pas seulement un public à l’entendre mais à regarder dans le même temps le tableau qui l’a inspirée. Elle oppose au bref coup d’œil que l’on jette le plus souvent aux arts plastiques une autre durée indissociable de l’action que commande la rhétorique selon Quintilien pour prononcer un discours avec l’expression qui convient. Il ne s’agit pas autrement pour Thomas Huber d’inciter le public à voir son tableau mais de le convier à assister également à la séance qu’il a spécialement préparée à son attention. Séance nʼest donc pas seulement le titre d’une œuvre mais concerne la situation dans laquelle l’orateur entend placer son auditoire pour l’occasion. Au choix d’avoir installé son tableau sur un chevalet répond la disposition des chaises où chacun prendra place. On entend ainsi Thomas Huber s’enquérir du confort des spectateurs au tout début de sa conférence : « Pouvez-vous voir le tableau ? Vous êtes-vous placés de sorte que rien nʼéchappe à votre attention ? Quand vous aurez trouvé votre place, jʼespère que vous serez en mesure de vous concentrer sur ce qui va suivre. » Les mots de la rhétorique de Thomas Huber ont non seulement pour fonction de s’adresser à un public mais de persuader ce dernier de les suivre en toute confiance dans l’espace de l’œuvre. Si la parole doit susciter la curiosité, rien non plus dans le tableau ne doit freiner l’implication des regardeurs. C’est au contraire pour ne pas constituer un obstacle que sa facture se caractérise par une minutieuse attention portée à la régularité des aplats, la précision des modelés, la netteté des contours, la justesse des rendus chromatiques. « Il est peint de telle sorte quʼil ne doit pas vous coûter de vous transposer dans lʼespace représenté. » La toile elle-même en tant que représentation est une illusion à laquelle les mots de l’artiste invitent à prendre part. On trouve ainsi dans le journal d’Eugène Delacroix une note suggérant de ne pas réduire à sa seule acception rétinienne le mot illusion. Delacroix écrit de cette façon à la date du 13 janvier 1857 : « Ce terme qui ne s’applique ordinairement qu’à la peinture, pourrait s’appliquer à certaine littérature[4]. » Dans cette perspective, le discours devient création à part entière. Face à l’assemblée réunie pour la circonstance, Thomas Huber, peintre, est un médium. En animant une séance de spiritisme, son rôle est de servir de trait d’union entre la salle et l’espace représenté au même titre qu’un médium est doté de la capacité d’entrer en communication avec des esprits. Mais c’est aussi sous les yeux des spectateurs qu’il se présente en opérant en direct à la manière d’un prestidigitateur. Nulle dissonance ne doit heurter la vue ou l’oreille pour ne pas entraver l’accès à la scène peinte de Séance. Le prestidigitateur prend garde à maintenir une parfaite continuité entre ses propres gestes, les objets qu’il manipule et son entourage. La situation n’est pas non plus sans faire penser aux manœuvres de suggestion auxquelles recourt l’hypnose pour plonger ses cobayes dans un état de léthargie proche du sommeil. C’est en outre quelques instants avant de clore sa conférence que Thomas Huber intimera à son auditoire l’ordre de se réveiller en frappant soudainement dans ses mains pour signifier la fin de la séance. La scène de l’escamoteur[5] que dépeint Jérôme Bosch n’est pas loin de la magie de la proximité que représente le close-up aujourd’hui.
Jérôme Bosch (ou atelier ou suiveur), L’Escamoteur, à partir de 1496. Huile sur bois, 53,7 x 65,2 cm. Musée municipal, Saint-Germain-en-LayeCopié, détourné, dérobé, le tableau de Saint-Germain-en-Laye est aujourd’hui conservé dans un coffre-fort. Son attribution fait encore l’objet de discussions et controverses. Il nous montre une scène de la vie quotidienne doublée d’une des premières représentations connues de la magie. La composition est simple : la scène réunit un magicien officiant devant un groupe de badauds. Leurs regards se portent vers le tour qu’il leur présente sans qu’aucun ne se dirige dans la même direction. Face à lui, le personnage qui lui voue toute son attention, plié en avant, crache une grenouille vivante. Ni son profil, ni ses vêtements n’attestent qu’il s’agit d’un homme ou d’une femme. Comment pourrait-il remarquer qu’un voleur s’empare de sa bourse par derrière tout en regardant en l’air ? Seul un enfant muni d’un moulin à vent semble être le témoin de la scène. On pourrait toutefois observer avec l’index du patricien à côté de son épouse non pas seulement un signe d’avertissement mais un geste de désignation. Alors que la scène se passe en silence, tout est ici affaire de gestes. Tout est question de croyance. L’art de l’illusion n’est pas moins affaire d’ironie comme le rappelle Vladimir Jankélévitch[6] en prenant l’exemple de L’Escamoteur comme l’emblème de l’agilité de l’imagination à s’adapter à toutes les situations. Le jeu des gobelets que détaille le panneau de Bosch est encore décrit par Robert-Houdin dans ses mémoires Comment on devient sorcier[7]. Mais c’est une version gravée d’un certain Balthasar Van den Bos, vers 1550, qui supplée au mutisme de la peinture et lui donne un sens vertueux.
Balthasar van den Bos, L’Escamoteur, c. 1550-1560. Gravure en taille douce, 23.8 x 32 cm. Staatliche Graphische Sammlung, MunichTelle est la valeur du texte rédigé à l’attention du lecteur de la gravure : « Oh combien de tours de passe-passe ne trouve-t-on pas en ce monde ? Ceux qui grâce au sac à malices font merveille amènent par leurs tours trompeurs le peuple à cracher des choses curieuses sur la table. C’est ainsi qu’ils réussissent leur coup. Ne leur faites donc jamais confiance, car, si tu perdais également ta bourse, tu t’en repentirais. » À quelques éléments près, en plus de l’ajout d’un compère associé au pickpocket, l’image décrit les mêmes faits et gestes avec le bateleur manipulant une petite balle et la victime expectorant sa grenouille au milieu du public ébahi. Il n’y a un qu’un pas du tour de passe-muscade au sort d’avaler un crapaud. Sur la table, l’escamoteur a déposé plusieurs objets : deux gobelets, une baguette (indispensable pour un magicien), trois billes, un cône. Tout son art consiste à faire passer une muscade d’un gobelet à l’autre avec une habileté qui échappe à l’observation des spectateurs. Tout en montrant ce qui tombe sous les yeux, il démontre qu’une image peut en cacher une autre. Deux gobelets à la place des yeux, une baguette et un cône en guise de nez, une grenouille pour tenir lieu de langue : il n’en faut pas davantage pour prendre le change et voir apparaître une tête duplice derrière les instruments de l’illusionniste. Le point de vue en plongée que nous donne Séance produit une sensation paradoxale d’attachement à distance. C’est tout en maintenant une vision surélevée qu’il semble se couler dans le cadre de la pièce décrite. « Avez-vous remarqué que vous volez ? », nous demande Thomas Huber à ce sujet. Le procédé emprunté à l’esthétique cinématographique consistant à voir les choses de haut renforce l’impression de suspens que dégage l’image de Séance. Thomas Huber n’est évidemment pas le premier à jouer sur le rapprochement des mots suspens et suspension à propos du cinéma d’Alfred Hitchcock qu’il évoque durant son discours.
Alfred Hitchcock, La Mort aux trousses (North by Northwest), 1959Nombre d’éléments contenus dans Séance, à l’exception bien entendu de la bizarrerie de la situation qu’il met en scène, ne sont pas sans rappeler certaines séquences de films. N’est-ce pas le réalisateur de Psychose qui parlait de faire de la « direction de spectateurs » en définissant le cinéma en une phrase lapidaire : « c’est d’abord des fauteuils avec des spectateurs dedans[8]. » La devise semble s’accorder au stratagème de Séance pour retenir toute l’attention de son spectateur après l’avoir installé dans une de ces célèbres chauffeuses dites « Barcelona » dessinées par Mies van der Rohe et et Liliy Reich en 1929[9].
Ludwig Mies van der Rohe et Liliy Reich, Fauteuil Barcelona, MR 90 conçu pour le pavillon allemand de l’Exposition internationale de Barcelone de 1929 à BarceloneTout se passe en effet comme s’il s’agissait dans cette séquence de fixer un arrêt sur image pour en perturber l’ordre. Ou peut-être s’agirait-il de fausser sa perception comme il arrive parfois qu’un élément inattendu vienne déranger le cours des choses sans raison apparente ?Ce sont ainsi nombre de questions que ne manque pas de soulever Thomas Huber devant son tableau sans qu’elles ne trouvent de réponse. Mais pourquoi lʼhomme reste-t-il assis si calmement sans avoir visiblement la moindre idée de ce qui se trame sous ses yeux ?
Thomas Huber, Séance, 2009 (détail)Le spectacle de ces paires de jambes nues sorties de sous les quatre côtés du tapis ne peut-il parvenir à lui dessiller la vue ? Comment ne peut-il pas s’apercevoir que ce qui se joue sous ses yeux ne saurait être appelé autrement qu’une partie de jambes en l’air ? Qu’est-ce qui justifie de même l’indifférence de l’employée de maison, interdite sur le seuil de la porte, son plateau avec boissons en main ?
Thomas Huber, Séance, 2009 (détail)Ces jambes sont-elles bien réelles ? Si elles sont représentées de façon plausible, les corps qui les prolongent perdent ostensiblement leur consistance en s’enfouissant dans le sol. Ce n’est pas non plus sans une indéniable cocasserie que le « colloque pictural[10] » de Thomas Huber intègre la rhétorique de l’étrangisation consistant à modifier la perception des choses pour en accroître l’acuité. S’arrêter sur une image ne se limite pas, pour Thomas Huber, à distraire un public, mais c’est peut-être toutefois en amusant le tapis qu’il le conduit à se défier de sa tendance naturelle à tenir la réalité pour sûre. Comme dans le tour de L’Escamoteur de Bosch, le tableau Séance est une invitation à ne pas se satisfaire des évidences, fût-ce les plus commodes et rassurantes. C’est au contraire qu’il constitue une invitation à poursuivre nos efforts, et, partant, à développer notre plaisir de scrutateurs. Comment, dès lors, ne pas penser à la nouvelle d’Henry James, The Figure in the Carpet, exemplifiant une théorie de l’art fondée sur l’expérience de son destinataire placé en situation de producteur de sens, voire de co-créateur de l’œuvre ? L’exemple est ici emprunté à la littérature, mais il sert aussi bien à la peinture qu’à toutes les formes d’art. Il prend l’allure d’une investigation policière lorsque le narrateur se trouve mis au défi de percer le sens profond de l’œuvre de l’écrivain Hugh Vereker dont il est un grand admirateur en tant que critique. Comment a-t-il pu être aveugle à ce point pour ne pas reconnaître ce qui devait lui sauter aux yeux ? Comment a-t-il pu s’illusionner en s’en tenant à la surface des choses ? Lui-même concède que le dessein de Vereker forme quelque chose comme « un motif complexe dans un tapis persan[11] ». Mais c’est bien malgré l’intention de son auteur que cette image n’apparaît pas au grand jour tandis que d’aucuns y voient un secret de polichinelle. De son avis, elle ne serait pas cependant autre chose que le fil même sur lequel les perles d’un collier sont enfilées pour les relier entre elles. C’est de même, pour Thomas Huber, que « derrière sa surface, le tableau cache des significations quʼune observation intéressée peut déceler. » Il est aussi significatif que le récit de James croise la métaphore du motif dans le tapis et le geste de jeter un œil par-dessous le rideau avant que le spectacle ne commence. Une comparaison analogue permettra à Thomas Huber d’annoncer la fin de la représentation pour conclure son discours en attirant notre attention sur la fonction des rideaux tirés dans le fond de la scène de Séance. Difficile en effet de ne pas soutenir le parallèle entre ces éléments emblématiques du théâtre. Dans sa Philosophie de l’ameublement, Edgar Allan Poe souligne leur importance en s’intéressant plus particulièrement au tapis qu’il décrit comme « l’âme de l’appartement » parce que « de lui sont déduites non seulement les couleurs mais aussi les formes de tous les objets qui reposent dessus[12]. » Nombre de détails mériteraient d’être signalés pour étudier plus précisément le soin avec lequel non seulement Thomas Huber a peint son tableau mais l’a composé comme on pare d’objets et d’accessoires une pièce d’ameublement pour son confort. Rien à l’entendre n’aurait été laissé au hasard ou choisi faute de mieux ainsi que Hugh Vereker peut expliquer que son secret régit de manière flagrante chaque ligne, chaque mot, chaque point ou virgule de son œuvre. Tout semble avoir été tracé au cordeau à l’exception des vagues onctueuses que provoque le ballet burlesque des spectres sans tête cachés sous le tapis. (On remarquera au passage que le seul désordre laissé par leurs chaussures, permettant d’identifier le sexe de leur propriétaire, supprime d’un coup la question de savoir où sont passés leurs vêtements). Même les vibrations cinétiques des carrés roses et noirs sur le tapis violet n’ont rien à envier aux dessins arabesques et aux rythmes chargés des tapis persans auxquels Henry James et Edgar Allan Poe font référence dans leur texte respectif. Les lectures approfondies de Freud que Thomas Huber devait faire pour réaliser son tableau ne devaient pas non plus influencer son choix pour s’arrêter sur le tapis ludique que Josef Hoffmann a dessiné pour garnir une chambre d’enfants dans le Palais Stoclet à Bruxelles.
Josef Hoffmann, chambre d’enfants avec un tapis ludique, Palais Stoclet, Bruxelles, 1905-1911Tout, au contraire, oppose le goût de Freud, grand amateur de tapis chamarrés, pour le style hétéroclite Gründerzeit (lʼépoque de la fondation de l’Empire allemand au 19e siècle) à la tendance moderniste des ateliers viennois que représente Josef Hoffmann, son contemporain.
Le cabinet de consultation de Sigmund Freud n°19 de la Berggasse, Vienne, 1938
Thomas Huber, Séance, 2009 (détail)Dans le tableau Séance, comme dans le discours du même nom que tient son auteur, le tapis ne s’arrête pas au seul motif irisé couvrant le sol mais il s’étend sur l’ensemble de la scène représentée jusqu’à la toile entière. L’illusion ne se limite pas aux seuls effets optiques que produisent l’alternance de formes et de couleurs. C’est à l’instar de la mètis d’Hermès « tressant ses liens pour le plaisir de fasciner[13] » que l’art de Thomas Huber nous prend dans ses rets. On dirait que les fils de trame du tapis d’Hoffmann se poursuivent dans la grille que dessine la perspective au sol. Marcel Détienne et Jean-Pierre Vernant écrivent dans leur livre sur Les Ruses de l’intelligence consacré à la mètis des grecs : « Ce qui s’inscrit dans l’entrelacs des directions opposées, tracées sur le sol par la mètis d’Hermès, c’est, au sens propre, une énigme, que les Grecs appellent tantôt ainigma, tantôt grîphos, du même nom qu’un filet de pêche d’une certaine espèce. Car une énigme se tresse comme un panier ou une nasse[14]. » Séance est un piège. Pris par son image et tout autant captivés par son texte, nous tombons dans ses filets tout comme on plonge ses regards dans une pièce inconnue avant d’en ressortir sans être complètement certain d’avoir tout vu et tout compris mais d’avoir plutôt imaginé beaucoup de choses. [1]. La nouvelle d’Henry James, « The Figure in the Carpet » parut pour la première fois en Angleterre en janvier et février 1896 dans le journal Cosmopolis. Elle a donné lieu à plusieurs traductions en français avec des titres différents : « L’Image dans le tapis » ou « Le motif dans le tapis ». [2]. Victor Chklovski, L’Art comme procédé [1917], traduit du russe par R. Gayraud, Allia, 2008. « Le but de l’art est de délivrer une sensation de l’objet, comme vision et non pas comme identification de quelque chose de déjà connu ; le procédé de l’art est le procédé “d’étrangisation” des objets, un procédé qui consiste à compliquer la forme, qui accroît la difficulté et la durée de la perception, car en art, le processus perceptif est une fin en soi et doit être prolongé […]. » (p. 23). [3]. Thomas Huber, Mesdames et Messieurs. Conférences 1982-2010, 2012, Genève, Mamco, 2012. Toutes les citations données sans autre indication sont extraites de la conférence Séance (p. 611-622). À l’occasion de son exposition Extase au Centre culturel suisse, du 21 janvier au 2 avril 2017, Thomas Huber a prononcé Séance, le 25 janvier, devant l’image projetée sur grand écran dans l’auditorium du CCS. Durant l’exposition Thomas Huber – À l’horizon présentée au musée des Beaux-Arts de Rennes du 4 février au 21 mai 2017 (commissariat : Anne Dary), une vidéo de la conférence filmée à la galerie Skopia était diffusée sur un écran accroché à côté du tableau Séance. [4]. Eugène Delacroix, 13 janvier 1857, Journal 1822-1863, Paris, Plon, Les mémorables, 1980, p. 609. [5]. Peint à partir de 1496, le tableau L’Escamoteur est attribué à Jérôme Bosch, ou à son atelier, voire à un suiveur. Il s’agit d’une huile sur bois mesurant 53,7 x 65,2 cm. Stocké dans un coffre-fort depuis 1979 sur décision du conseil municipal de Saint-Germain-en-Laye, le tableau a été volé en décembre 1978 par un commando du mouvement révolutionnaire Action directe avant d’être restitué intact quelques mois plus tard. Voir au sujet de l’œuvre, Agnès Virole, et alii, Jérôme Bosch et l’Escamoteur, Paris, Somogy, Saint-Germain-en-Laye, musée municipal, 2002. Voir également, outre les réflexions de Vladimir Jankélévitch citées ci-après, la phrase de Gilbert Lascault donnée en conclusion de son texte « Pour une psychanalyse du visible », dans Bernard Tesseydre, et alii, Les Sciences humaines et l’œuvre d’art, Bruxelles, La Connaissance, Témoins et témoignages, 1969, p. 108 : « L’emblème de l’art du visible est peut-être un tableau de Bosch : L’Escamoteur. » [6]. Voir Vladimir Jankélévitch, L’Ironie [1964], Paris, Flammarion, Champs, 1985, p. 33. [7]. Voir Robert-Houdin, Comment on devient sorcier [1868], Paris, Omnibus, 2006, p. 641 sq. : « Introduction au jeu des gobelets (Discours comique) ». Voir également « Escamotage, prestidigitation », p. 457 : « Escamotage vient du mot arabe escamote, qui signifie la petite balle de liège à laquelle on a donné plus tard le nom de muscade, à cause de sa ressemblance avec ce fruit. Dans le principe, le mot escamotage s’appliquait uniquement à l’action de jouer des gobelets ; il a servi, ensuite, à généraliser l’exécution des tours d’adresse. » [8] Alfred Hitchcock, cité dans Paul Virilio, Esthétique de la disparition, Paris, Balland, Le commerce des idées, 1980, p. 73. L’auteur ne donne pas la source de la citation. Comme Thomas Huber l’indique dans son discours (« Nous connaissons la scène par les films »), le point de vue en hauteur dans Séance n’est pas sans faire penser aux plans en plongée utilisés par Hitchcock dans la séquence de La Mort aux trousses (1959) tournée dans le salon de la maison Kaufmann dessinée par Frank Lloyd Wright. [9]. Le modèle MR90 ou chaise « Barcelona » fut conçu pour le pavillon allemand de l’Exposition internationale de Barcelone de 1929. Il apparaît dans plusieurs films comme, par exemple, Casino Royale (2006) réalisé par Martin Campbell. Outre la chaise « Barcelona », d’autres objets de design jouent un rôle emblématique dans plusieurs tableaux de Thomas Huber. Voir, par exemple, la chaise Série 7 (1955) d’Arne Jacobsen figurant seule dans Georgs Raum de 1993 (huile sur toile, 50 x 70 cm. Collection G. & E. Böhringer). [10]. L’expression est de Jean-Marc Poinsot, « Le colloque pictural de Thomas Huber », Art press, n° 129, octobre 1988, p. 42. [11]. Henry James, « Le motif dans le tapis », traduit de l’anglais par P. Fontaney, Nouvelles complètes III, 1898-1898, Paris, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, 2011, p. 1135. [12]. Edgar Allan Poe, Philosophie de l’ameublement [1840], traduit de l’anglais (États-Unis) par C. Baudelaire, Paris, Gallimard, Folio, 1978, p. 252. [13]. Marcel Détienne et Jean-Pierre Vernant, Les Ruses de l’intelligence. La mètis des grecs [1974], Paris, Flammarion, Champs, 1978, p. 290. [14]. Ibidem.