Un jour, nous partirons : notes sur les migrations et autres distances [Um dia partiremos: anotações sobre migrações e outras distâncias]
Karina Dias et Luciana Ferreira
Nr 15 . 23 avril 2025
Table des matières
- Notes sur la maison
- Notes sur l’exil
- Notes sur l’étranger
- Notes sur la tornade
- Notes sur l’hospitalité
- Notes sur les frontières
- Notes sur la carte4
- —— Texte en portugais ——
- Um dia partiremos: anotações sobre migrações e outras distâncias
- Notas sobre a casa
- Notas sobre o exílio
- Notas sobre o estrangeiro
- Notas sobre o tornado
- Notas sobre a hospitalidade
- Notas sobre as fronteiras
- Notas sobre o mapa11
Note : Cet article est présenté dans deux versions : d’abord en français puis en portugais.
je pense que seul celui qui a besoin
de traverser rapidement une frontière
sait ce qu’est une maison
celui qui a construit sa maison
dans un pays qui ne veut pas de lui
ceux que leur maison
suit comme un chien
Ana Martins Marques
Peut-être les migrations pourraient-elles être comprises, d’une certaine façon, comme des expériences fragmentées et fragmentaires, fractionnées, qui, une fois additionnées, ne traduisent probablement pas une idée de totalité, ni ne construisent un discours cohérent ou linéaire. Des migrations, nous pouvons recueillir des traces, des notes, des mots laissés en chemin. Entre l’attente de l’arrivée, et la douleur de la rupture avec sa terre natale, une fissure radicale s’ouvre pour celui qui part. Il y a ceux qui, dans la fragilité de la fuite, développent des activités artistiques. Ces expériences provoquent des inquiétudes autour de ce que pourrait être une tentative d’établir une résidence, une recherche de maison et de la construire là où il n’y en a pas.
Notes sur la maison
Prétendant développer une phénoménologie de l’espace et, avec elle, des valeurs d’intimité de l’espace intérieur, Bachelard a opté pour la maison comme élément privilégié. Elle serait « notre coin du monde », notre « premier univers », un lieu d’accueil pour nos rêves et nos rêveries. Les rêves et les rêveries exigeraient la sécurité de murs solides et d’un toit qui protègerait des tempêtes, un « non-moi qui protège le moi » (Bachelard, 2008, p.24) :
«[…] tout espace vraiment habité contient l’essence de la notion de maison. […] Dans la vie de l’homme, la maison éloigne les contingences, multiplie les conseils de continuité. Sans elle, l’homme serait un être dispersé. » (Bachelard, 2008, p.24-26)
La maison aurait ainsi une valeur intrinsèquement maternelle, de soutien profond, de protection et d’accueil de l’existence humaine. Et il y aurait, comme référence plus profonde, la « maison natale », la maison des souvenirs les plus anciens, où les habitudes se sont forgées : « La maison natale est la maison habitée […] par-delà les souvenirs, la maison natale est physiquement ancrée en nous. C’est un ensemble d’habitudes organiques. […] qui a gravé en nous la hiérarchie des différentes fonctions de l’habitat. Nous sommes le diagramme des fonctions d’habitat de cette maison ; et toutes les autres ne sont jamais que les variations d’un thème fondamental. » (Bachelard, 2008, p.33-34)
À partir de cette expérience de l’habitat, où naissent les habitudes, la maison devient essentiellement « un corps d’images qui donnent à l’homme des raisons ou des illusions de stabilité » (Bachelard, 2008, p.36). L’habitude est l’organisation des rapports entre une existence et le lieu. Elle établit des matrices qui suggèrent la stabilité et permettent à la maison habitée d‘accomplir sa fonction protectrice. L’habitude acquise en habitant dans la maison natale est transférée et reproduite dans d’autres maisons, perpétuant ainsi le sentiment de sécurité.
Notes sur l’exil
Mais il peut arriver de perdre sa maison. D’être en exil. Comment poursuivre quand on a perdu son coin de monde ? Vers où va cet être maintenant dispersé ?
[Figure 1]
Ces questions nous saisissent avec une intensité maximale lorsque nous découvrons les images du Centro di permanenza temporânea d’Adrian Paci. Une vidéo montre des personnes – de toute évidence, immigrés – sur l’échelle d’un avion, sur une piste d’aéroport, mais sans avion à proximité. Nous ne savons pas de quel aéroport il s’agit, nous ne savons pas dans quel pays nous sommes, nous ne savons pas qui sont ces personnes, nous ne savons pas d’où elles viennent, nous ne savons pas où elles vont. Elles ne possèdent même pas de bagages. Elles attendent dans un espace suspendu qui est aussi un hiatus temporel entre ce qui fut et ce qui sera. L’image, qui parfois cadre quelques visages, ne nous apprend rien. Elle nous donne seulement le contact brutal avec l’attente calme, désinformée, en lacune de personnes qui n’ont plus le pied à terre, déplacés dans leur propre espace.
Pour Blanchot, l’expatrié n’est pas seulement celui qui a perdu son pays, mais aussi celui qui a découvert une façon de vivre sans habitude (Blanchot, 2010b, p.42). L’exil auquel il est confronté exige l’abandon de l’habitude. C’est pour cela qu’il est difficile de posséder une maison, bien que cela reste une recherche incessante. Une recherche qui, par la force des choses, détache l’individu de sa maison natale. Une recherche, nécessairement urgente, mais pas exigeante. L’exil est un transit, une arrivée qui n’en finit pas, un départ qui ne jamais ne se termine. Un état suspendu. Tout exilé est un étranger face au monde et face à lui-même.
Notes sur l’étranger
Mais, qui est l’étranger ? – questionne Maldonado. Ce à quoi il ressasse une réponse :
« [Celui qui] Vient de loin. […] [qui] doit quitter la terre de ses parents, sa maison, sa mémoire. […] L’étranger a migré. Et en migrant, il disloque tout lien avec la nostalgie et la tradition […] Ses adieux ne laissent pas de trace ni de souvenir. Aucune mémoire n’a de réponse. Car il n’y a aucune autre réponse que l’oubli : oubli qui devient absence ; absence qui, pour ainsi dire, n’a pas besoin de racines ; racines que l’exode de la langue maternelle et de l’illusion qu’un mot peut dévoiler (et pas seulement révéler) transforme en pure errance » (Maldonado, 2004, p. 30-31)
L’étranger est celui qui salue en partant. Il laisse derrière lui la stabilité de la maison et des rêves. Il laisse derrière lui sa langue maternelle, la maison de toutes les maisons. Il plonge dans un abîme d’une profondeur incommensurable, où il n’existe pas d’abri. L’étranger est une question. Et, étant cette question inquiète et insistante, elle-même imprécise, elle n’attend déjà plus aucune réponse.
Notes sur la tornade
Une personne, un étranger, poursuit des tornades dans le sud de la ville de Mexico. C’est une région poussiéreuse où les tornades sont fréquentes à la fin de la saison sèche. Cette personne se fixe trois objectifs pendant sa poursuite : attendre les tornades, les poursuivre, les atteindre ou les perdre. Il l’a fait pendant dix ans en enregistrant des vidéos de l’expérience. Daniela Name partage ses impressions sur ces enregistrements : « On entend sa respiration pendant qu’il court vers la tempête, on voit la caméra perdre son assurance lorsqu’il entre au cœur du tourbillon, on remarque l’objectif rayé par les pierres et la poussière qui englobe et secoue tout » (Name, 2010)
[Figure 2]
La personne qui réalise cette action est l’artiste Francis Alÿs, un Belge qui a migré à Mexico. La ville et ses environs constituent son matériau de production, où il développe des actions qui mettent en scène son corps en relation avec le lieu.
L’expérience de Tornado est également partagée dans un livre intitulé Dans une situation donnée (2010) où, entre autres choses, l’artiste recense une série de mots libres écrits à propos des images photographiques de l’action. Il explique :
« J’ai lu quelque part, je ne sais plus où, que les concepts sont intemporels. Ouverts ; et donc durables, continus. Ils ne peuvent être dits, on ne peut que les mettre en scène. Et je pense alors : comment raconter un concept qui ne peut être mis en scène qu’avec du temps ? En filmant Tornado, j’ai remarqué que l’action continue de la caméra annule toute séquence possible d’événements. Et je me demande : comment assembler les quinze heures ou plus de matériel enregistré ? Par manque d’une narration linéaire, une série de mots ont été collés sur le mur du studio, des mots qui me sont venus pendant le tournage. » (Alys, 2010, s/p)
Parmi les mots qui ont surgi et ont été écrits par l’artiste : aléatoire, apathie, attraction, conflit, catastrophe, catharsis, hasard, chaos, confusion, contre-information, crise, déception, abandon, déflagration, dispersion, rupture, extase, échec, peur, flux, harmonie, hémorragie, impasse, intolérance, rire, léthargie, négociation, bruit, tranquillité…
Tornado serait-elle une lecture possible de l’expérience de la migration ?
Notes sur l’hospitalité
Un étranger ne se sent jamais chez lui. Comme on traverse une tornade, il franchit le seuil d’une maison qui ne lui appartient pas et espère y trouver l’hospitalité. « L’hospitalité présuppose […] la possibilité d’une délimitation rigoureuse des seuils ou des frontières : entre le familier et le non-familier, entre l’étranger et le non-étranger » (Derrida, 2003, p.43). Et, une fois le seuil franchi, celui qui fait face à l’étranger lui demande son nom, en tout premier. On n’offre pas l’hospitalité sans que l’étranger ne se définisse comme tel. Il faut savoir qui il est et d’où il vient pour le soumettre aux lois de l’hospitalité, car « du point de vue du droit, l’hôte, même lorsqu’il est bien reçu, est avant tout un étranger, qui doit rester étranger » (Derrida, 2003, p.63). Et tout cela est déjà installé dès le premier moment où, ayant franchi le seuil, l’étranger doit se présenter dans une langue qui ne lui appartient pas.
Mais Derrida se demande si une autre forme d’hospitalité ne serait pas possible :
« L’hospitalité consiste-t-elle à interroger celui qui arrive ? Commence-t-elle par la question adressée au nouvel arrivant […] : comment t’appelles-tu ? […] Ou bien l’hospitalité commence-t-elle par un accueil sans questions, par un double effacement, l’effacement de la question et du nom ? Est-il plus juste et plus aimable de poser une question ou de ne pas en poser ? […] Offre-t-on l’hospitalité à un sujet ? À un sujet identifiable ? Un sujet identifiable par son nom ? Un sujet de droit ? Ou bien l’hospitalité devient-elle, se donnant à l’autre avant même qu’il ne s’identifie, avant même qu’il ne soit (posé ou supposé comme tel) un sujet, un sujet de droit et un sujet que l’on peut appeler par son nom de famille, etc. » (Derrida, 2003, p.26-27)
En matière d’hospitalité, il existe une antinomie entre les lois de l’hospitalité prévues par la loi et la loi inconditionnelle de l’hospitalité. Ce sont deux régimes contradictoires et inséparables, où la loi inconditionnelle nécessite des lois du droit tandis qu’elle les corrompt et les subvertit, car la loi inconditionnelle de l’hospitalité serait sans loi, dépourvue de devoirs et d’impératifs (Derrida, 2003, p.69-73).
Pousser jusqu’à son paroxysme la question des étrangers et de l’hospitalité est exactement ce qu’à fait Paulo Nazareth. En 2011, l’artiste brésilien a parcouru à pied en auto-stop le trajet depuis sa maison du Minas Gerais jusqu’en Amérique du Nord. Sur le parcours, il a réalisé une série d’enregistrements de cette expérience, réunis dans l’œuvre Notícias da América. Dans l’un d’entre eux, l’artiste porte sur sa poitrine une pancarte en carton écrite à la main où il met en vente son image d’ « homme exotique ». La pancarte est écrite en anglais, langue officielle du pays où il se trouve, et devant elle, en tant qu’homme exotique, il s’affirme comme un étranger déplacé, n’ayant pas sa place. En mettant son image en vente, il négocie sa permanence. La scène se déroule, entre autres, devant une camionnette pleine de bananes, dans son exposition à Art Basel, à Miami. Ici, l’étranger paraît se soumettre avec ironie aux lois de l’hospitalité imposées par le droit local.
[Figure 3]
Notes sur les frontières
À un autre moment de son parcours, Paulo Nazareth se tient devant un panneau de l’État d’Arizona où, il porte sur sa poitrine une autre pancarte en carton écrite à la main, cette fois-ci en espagnol, disant que nous avons également droit à ce paysage. Ainsi, Nazareth affirme la revendication de l’Amérique Latine sur son appartenance à ce lieu. À ce moment, il y a une tentative d’explosion des frontières :
« Mon concept de patrie s’élargit de jour en jour… Né au Brésil, je suis latino-américain, et en tant que latino-américain, je suis également mexicain… Je fais partie de toutes les terres que mes pieds ont foulé… il est impossible de séparer ces terres par une ligne imaginaire appelée frontière… c’est peut-être pour cette raison qu’ils ont construit le mur au nord : une tentative d’empêcher le Mexique d’être le Mexique à l’intérieur des États-Unis. » (Nazareth, 2009, s/p)
[Figure 4]
Serait-il possible de traverser les frontières comme si nous n’étions pas des intrus ? D’être à l’ouest sans craindre les vents du sud. Dans cette collision de mondes, fixer la ligne de partition, écouter les voix qui viennent de loin. Que murmure le paysage ?
Rimbaud, le poète marcheur, dans ses échappées rageuses, hurlait son impossibilité de rester où il se trouvait, prisonnier d’un « ici » atroce. Si l’ici est impossible, il reste le mouvement, la distance qui nous sépare de l’endroit où nous sommes. « Adieu ici, où que tu sois2. »
Face à la frontière, habiter toutes les langues, écouter une langue muette, pratiquer une langue nomade, trouver les mots courageux (Gallienne, 2020). Sans hospitalité, il n’y a pas de terre, et pas de rêve3.
Notes sur la carte4
[Figure 5]
Pourquoi portons-nous des montres et non des boussoles ? Les noms sont des géographies. Ce sont des voix qui susurrent dans une langue inconnue. Ce sont des reliefs. Ils indiquent des directions, des distances, des topographies nomades. Partir. Laisser derrière soi les noms, un abîme de noms, le murmure, le mot secret, les lieux oubliés.
Au milieu des montagnes, comment savoir que l’on a franchi une frontière ? Grâce à la hauteur de ses cimes ? Grâce à la glace que contient ses sommets ? Grâce à l’intensité de la brume ? Vers combien de directions le blanc pointe-t-il ? Il faut être éveillé. Prendre le temps. Chercher un ciel étranger, s’enquérir des noms. « …ce n’est pas le même soleil… Je sais bien que ce n’est pas le même soleil… » dit Camus. (Camus, 2014, p.40)
Comment arriver ? Faut-il changer de route ? S’éloigner des tempêtes ? Accepter les distances ? Qu’est-ce qui nous pousse à débarquer ? L’absence de voisinage ? La possession d’une mesure ? L’illusion d’un abri ? Les eaux familières…
Les lieux se défont, ce sont des mots et des kilomètres. Le paysage rappelle que nous ne sommes pas seuls. Je suis ici, dans ce lieu, à cette intersection géographique, je suis ici. J’habite les jours, la route, les lieux, la brume qui recouvre la carte. Être à l’ouest.
Les noms sont l’ombre et l’horizon, ce sont des latitudes, des coordonnées imprévisibles. Longitudinal est notre cri.
« Je regarde la frontière et la terre semble dire : … passe. Rien d’autre. Rien de plus. », écrit Jaccottet. (Jaccottet, 1976, p.69)
Les frontières sont précaires. Habiter les frontières, leurs manières, leurs langues, les mots féroces, les noms étranges. Voir la terre, entendre les lieux. Certains vents viennent de loin. Les vents sont aussi des points cardinaux. Sur cette face clair-de-nuit, entrevoir les lieux, la résonance des choses.
Chaque carte est un paysage ombragé. Une note. Un croquis. Un point de vue. Un point de vue extérieur. Une vue qui s’introduit dans le nom. La possibilité de mesure et de contour éphémère. Une page pour un atlas.
Nommer des rivières, des collines, des kilomètres. Les distances sont nocturnes. Dans les vents, un soulèvement de mots, de mots courageux, de lieux oubliés. Parcourir une plaine, traverser des rivières : des rivières claires, … des rivières douces, … de grandes rivières. Regarder les montagnes, altitude insulaire. Avancer dans le désert, un désert de noms. Un désert de possibles futurs.
« Il suffirait d’un mouvement de distraction pour noyer les cinq continents.
La mer n’a pas de remords », écrit Jabès. (Jabés, 1990, p. 345)
Sur une carte, sommes-nous le jour ou la nuit ? L’ombre des lieux semble contenir toutes les saisons. Comme des Icares, nous survolons… Comment alors avoir les pieds sur terre ? Provoquer des secousses et ne pas craindre le monde à venir ? Regarder le passé. L’urgence du présent. Souhaiter des futurs. Lire le temps en attendant le danger, le piège des mots et l’espoir du récit. Attendre est un geste. Dans cette nuit décrétée, lire les étoiles, trouver un continent.
Quel est votre place sur la carte ? Les noms sont des destinations. Connaître les noms, un bout de terre, la fureur des lieux. La carte réunit la maison et tout ce qui nous en sépare ; la piste et le plan de vol; le port et les heures méridiennes. Où mène l’affranchissement de toute attache ? se demande Maldonado. (Maldonado, 2004, p.32)
Combien y a-t-il d’issues de secours ? Avoir les indications. Garder ses distances. Abandonner la carte. Dis-moi, qu’est-ce que tu y as vu ?5
—— Texte en portugais ——
Um dia partiremos: anotações sobre migrações e outras distâncias
penso que só sabe da casa
quem precisa atravessar
rapidamente uma fronteira
quem fez sua casa
num país que não o quer
aqueles a quem a casa
segue como um cão
Ana Martins Marques
As migrações talvez possam ser compreendidas, de certa forma, como experiências fragmentadas e fragmentárias, estilhaçadas que, somadas, provavelmente não traduzem uma ideia de totalidade e nem constroem um discurso coerente ou linear. Das migrações, podemos coletar pistas, anotações, palavras soltas pelo caminho. Entre a espera de se chegar e a dor do rompimento com a terra natal, uma fissura radical se abre para aquele que parte. Há quem, na fragilidade da fuga, desenvolva trabalhos artísticos. Essas experiências provocam inquietações acerca daquilo que possa ser a tentativa de estabelecer uma morada, a procura por uma casa e fazê-lo onde ela, a casa, não está.
Notas sobre a casa
Bachelard, pretendendo fazer uma fenomenologia do espaço e, com ela, dos valores de intimidade do espaço interior, elegeu a casa como elemento privilegiado. Seria ela o “nosso canto do mundo”, o nosso “primeiro universo”, um lugar de acolhimento dos nossos sonhos e devaneios. Sonhos e devaneios exigiriam a segurança de paredes sólidas e de um teto que protegeria das tempestades, um “não-eu que protege o eu” (Bachelard, 2008, p.24) :
“[…] todo espaço realmente habitado traz a essência da noção de casa. […] Na vida do homem, a casa afasta contingências, multiplica seus conselhos de continuidade. Sem ela, o homem seria um ser disperso.” (Bachelard, 2008, p.24-26)
A casa teria, assim, um valor intrinsecamente maternal, de profundo amparo, proteção e acolhimento da existência humana. E haveria, como referência mais profunda, a “casa natal”, a casa das memórias mais antigas, onde os hábitos se firmaram:
“A casa natal é a casa habitada […] para além das lembranças, a casa natal está fisicamente inserida em nós. Ela é um grupo de hábitos orgânicos. […] gravou em nós a hierarquia das diversas funções de habitar. Somos o diagrama das funções de habitar aquela casa; e todas as outras não passam de variações de um tema fundamental.” (Bachelard, 2008, p.33-34)
A partir dessa experiência do habitar, onde nascem os hábitos, a casa passa a ser, essencialmente, “um corpo de imagens que dão ao homem razões ou ilusões de estabilidade” (Bachelard, 2008, p.36). O hábito é a organização da lida de uma existência com o lugar. Estabelece padrões que sugerem a estabilidade e permitem que a casa habitada cumpra a sua função de proteção. O hábito adquirido no habitar a casa natal é transferido para e reproduzido nas outras casas, perpetuando a sensação de segurança.
Notas sobre o exílio
Mas acontece de perder a casa. Acontece o exílio. Como segue esse que perdeu o seu canto do mundo? Para onde vai esse ser agora disperso?
[Figure 6]
Estas questões nos tomam com sua máxima intensidade quando nos deparamos com as imagens de Centro di permanenza temporânea, de Adrian Paci7. Um vídeo registra pessoas – claramente imigrantes – em uma escada de aeronave, em uma pista de um aeroporto, sem qualquer avião próximo. Não sabemos de qual aeroporto se trata, não sabemos a que país pertence, não sabemos quem são essas pessoas, não sabemos de onde vieram, não sabemos para onde vão. Não possuem sequer bagagem. Apenas esperam em um espaço suspenso que é também um hiato temporal entre o que foi e o que será. A imagem, que por vezes enquadra alguns rostos, não nos informa nada. Dá-nos apenas o duro contato com a espera calma, desinformada, lacunar de pessoas que não conseguem pisar o chão, deslocadas no próprio lugar.
O expatriado é para Blanchot não apenas aquele que perdeu seu país, mas o que descobriu um modo de habitar sem hábito (Blanchot, 2010, p.42). O exílio que enfrenta exige o abandono do hábito. Por isso a casa é difícil, embora permaneça sempre uma procura incessante. Uma procura, por força, desapegada da casa natal. Uma procura, porquanto urgente, não exigente. O exílio é um trânsito, uma chegada que não se conclui, uma partida que nunca termina. Um estado suspenso. Todo exilado é um estrangeiro diante do mundo e diante de si mesmo.
Notas sobre o estrangeiro
Mas, quem é o estrangeiro? – pergunta Maldonado. E ensaia uma resposta:
“[Aquele que] Vem de longe. […] [que] tem que deixar a terra dos pais, a casa, a memória. […] Migra, o estrangeiro. E ao migrar desmancha qualquer vínculo com a saudade e a tradição […] Seus adeuses não deixam rastro ou memória. Nenhuma memória tem respostas. Pois nenhuma resposta pode se dar senão o olvido: o olvido que se torna ausência; a ausência que para dizer de si não necessita raízes; raízes que o êxodo da língua materna e da ilusão de que uma palavra possa des-velar (e não apenas revelar) transforma em pura errância” (Maldonado, 2004, p. 30-31)
O estrangeiro é o que se despede. Deixa para trás a estabilidade da casa e dos sonhos. Deixa para trás a língua materna, a casa de todas as casas. Salta em um abismo de profundidade não mensurável, onde não se faz abrigo. O estrangeiro é uma pergunta. E, sendo essa pergunta inquieta e insistente, ela mesma imprecisa, já não espera por qualquer resposta.
Notas sobre o tornado
Uma pessoa, um estrangeiro, persegue tornados no Sul da Cidade do México. É uma região empoeirada onde os tornados são comuns no final da estação da seca. Essa pessoa propõe, na perseguição, três movimentos: esperar os tornados, persegui-los, alcançá-los ou perdê-los. Faz isso por dez anos e registra a experiência em vídeo. Daniela Name compartilha suas impressões sobre esse registro: “Ouvimos sua respiração enquanto ele corre em direção à tempestade, vemos a câmera perder o prumo quando ele entra no meio do redemoinho, percebemos a lente ser arranhada pelas pedras e a poeira que envolve e sacode tudo.” (Name, 2010)
[Figure 7]
A pessoa que realiza esta ação é o artista Francis Alÿs, um belga que migrou para a Cidade do México. A cidade e seus arredores são o seu material de produção, onde desenvolve ações que mostram o seu corpo em relação com o lugar.
A experiência de Tornado é compartilhada também em um livro intitulado Numa dada situação (2010) onde, entre outras coisas, o artista coleciona uma série de palavras soltas escritas sobre imagens fotográficas da ação. Ele explica:
“Li em algum lugar, não me lembro onde, que os conceitos são atemporais. Abertos; portanto duradouros, contínuos. Que não podem ser ditos, que são apenas encenáveis. E penso: como se narra um conceito que só pode ser encenado no tempo? Ao filmar Tornado, notei que a atuação contínua da câmera anula qualquer sequência possível dos eventos. E me pergunto: como montar as quinze ou mais horas de material gravado? Por falta de uma narrativa linear, uma série de palavras foi afixada na parede do estúdio, palavras que me ocorreram durante a filmagem.” (Alys, 2010, s/p)
Entre as palavras ocorridas e escritas pelo artista estão: aleatório, apatia, atração, atrito, catástrofe, catarse, acaso, caos, confusão, contrainformação, crise, decepção, deserção, deflagração, dispersão, rompimento, êxtase, falha, medo, fluxo, harmonia, hemorragia, impasse, intolerância, riso, letargia, aleatório, negociação, barulho, quietude…
Tornado seria uma leitura possível da experiência da migração?
Notas sobre a hospitalidade
Um estrangeiro nunca se sente em casa. Como quem atravessa um tornado, ele atravessa a soleira de uma casa que não lhe pertence e espera, nela, encontrar hospitalidade. “A hospitalidade pressupõe […]a possibilidade de uma delimitação rigorosa das soleiras ou fronteiras: entre o familiar e o não-familiar, entre o estrangeiro e o não-estrangeiro” (Derrida, 2003, p.43). E, uma vez atravessada a soleira, aquele diante do estrangeiro, primeiramente, pergunta-lhe o nome. Não se oferece hospitalidade sem que o estrangeiro se defina como estrangeiro. É preciso saber quem ele é e de onde vem para submetê-lo às leis da hospitalidade, pois, “do ponto de vista do direito, o hóspede, mesmo quando bem recebido, é antes de tudo um estrangeiro, ele deve continuar estrangeiro” (Derrida, 2003, p.63). E tudo isso já está posto no momento primeiro quando, atravessada a soleira, o estrangeiro precisa se apresentar em uma língua que não lhe pertence.
Mas Derrida se pergunta se não seria possível outra hospitalidade:
“A hospitalidade consiste em interrogar quem chega? Ela começa com a questão endereçada a quem vem […]: como te chamas? […] Ou será que a hospitalidade começa pela acolhida inquestionável, num duplo apagamento, o apagamento da questão e do nome? É mais justo e mais amável perguntar ou não perguntar? […] Oferece-se hospitalidade a um sujeito? A um sujeito identificável? A um sujeito identificável pelo nome? Um sujeito de direito? Ou a hospitalidade se torna, se dá ao outro antes que ele se identifique, antes mesmo que ele seja (posto ou suposto como tal) sujeito, sujeito de direito e sujeito nominável por seu nome de família, etc?” (Derrida, 2003, p.26-27)
Há, na hospitalidade, uma antinomia entre as leis da hospitalidade previstas pelo direito e a lei incondicional da hospitalidade. São dois regimes contraditórios e inseparáveis, onde a lei incondicional necessita das leis do direito enquanto as corrompe e subverte, pois a lei incondicional da hospitalidade seria sem lei, desprovida de deveres e imperativos (Derrida, 2003, p.69-73).
Levar ao limite a questão do estrangeiro e da hospitalidade foi o que fez Paulo Nazareth. Em 2011, o artista brasileiro percorreu a pé e de carona o caminho da sua casa em Minas Gerais até a América do Norte. No percurso, fez uma série de registros da experiência que estão reunidos no trabalho Notícias da América. Em um desses registros, o artista carrega no peito uma placa de papelão escrita à mão onde coloca à venda a sua imagem de “homem exótico”. A placa é escrita em inglês, língua oficial do país onde se encontra, diante do qual, enquanto homem exótico, afirma-se como o estrangeiro deslocado, não pertencente. Ao colocar a sua imagem à venda, negocia a sua permanência. A cena acontece, entre outros momentos, diante de uma kombi repleta de bananas, dentro da sua exposição na Art Basel, em Miami. Aqui, o estrangeiro parece submeter-se, com ironia, às leis da hospitalidade impostas pelo direito local.
[Figure 8]
Notas sobre as fronteiras
Em outro momento desse percurso, Paulo Nazareth está em frente a uma placa do estado do Arizona onde, dessa vez, carrega no peito outra placa de papelão escrita à mão, agora em espanhol, dizendo que também temos direito àquela paisagem. Então, Nazareth afirma a América Latina reivindicando o pertencimento ao lugar. Neste momento, há uma tentativa de explosão de fronteiras:
“Mi concepto de patria todos los dias se expande… nascido en Brasil soy latino americano, siendo latino americano soy tambien mexicano… soy parte de cada tierra por donde pisaron mis pies… no hay como separar estas tierras con una linea imaginaria llamada frontera… quiza sea por eso que llevantaron el muro al norte: un intento de impedir que Mexico siga siendo Mexico adentro de Estados Unidos” (Nazareth, 2009, s/p)
[Figure 9]
Seria possível atravessar fronteiras como se intrusos não fôssemos? Estar a oeste e não temer os ventos que vem do sul. Nessa colisão de mundos, fixar a linha da partilha, escutar as vozes que vem de longe. O que sussurra na paisagem?
Rimbaud, o poeta caminhante, em suas fugas raivosas8 urrava a sua impossibilidade de permanecer onde se está, de ficar parado num “aqui” atroz. Se o aqui é impossível, resta o movimento, a distância que nos separa de onde estamos. “Adeus aqui, onde quer que seja9.”
Face à fronteira, habitar todas as línguas, escutar uma língua muda, praticar uma língua nômade, encontrar as palavras corajosas. (Gallienne, 2020). Sem hospitalidade, não há solo e nem sonho10.
Notas sobre o mapa11
[Figure 10]
Por que ganhamos relógios e não bússolas12? Os nomes são geografias. São como vozes que sussurram em uma língua desconhecida. São relevos. Apontam direções, distâncias, topografias nômades. Partir. Deixar para trás os nomes, um abismo de nomes, o sussurro, a palavra secreta, os lugares esquecidos.
Em meio às montanhas, como saber que ultrapassamos uma fronteira? Pela altitude de seus cumes? Pelo gelo contido em seu topo? Pela intensidade da bruma? Quantas são as direções que o branco aponta? É preciso estar acordada. Encontrar o tempo. Buscar um céu estrangeiro, indagar os nomes. “… não é o mesmo sol … eu sei bem que não é o mesmo sol …” constata Camus (Camus, 2014, p.40).
Como chegar? Desviar a rota? Afastar-se das tormentas? Aceitar as distâncias? O que nos convoca a desembarcar? A ausência de vizinhanças? A posse de uma medida? A ilusão de um abrigo? Águas familiares…
Os lugares se desfazem, são palavras e quilômetros. A paisagem lembra que não estamos sós. Aqui estou, neste lugar, nesta intersecção geográfica, aqui estou. Habitar os dias, o caminho, os lugares, a bruma que encobre o mapa. Estar à oeste.
Nomes são sombra e horizonte, são latitudes, são coordenadas imprevisíveis. Longitudinal é o nosso grito.
“Olho a fronteira e a terra parece dizer: … passe. Nada de outro. Nada mais” escreve Jaccottet (Jaccottet, 1976, p.69).
Fronteiras são precárias. Habitar fronteiras, seus modos, suas línguas, as palavras ferozes, os estranhos nomes. Ver a terra, ouvir os lugares. Há ventos que vem de longe. Os ventos também são pontos cardeais. Nessa face clara da noite, entrever os lugares, a ressonância das coisas.
Todo mapa é uma sombreada paisagem. Uma nota. Um esboço. Uma mirada. Uma mirada forasteira. Uma vista intrusa ao nome. Possibilidade de medida e efêmero contorno. Uma página para um atlas.
Nomear rios, montes, quilômetros. Noturnas são as distâncias. Nos ventos um levante de palavras, de palavras corajosas, de lugares esquecidos. Percorrer uma planície, cruzar rios: rios claros, … rios doces, … rios grandes. Olhar as montanhas, insular altitude. Mover-se no deserto, um deserto de nomes. Um deserto de futuros possíveis.
“Bastaria um movimento de distração para afogar os cinco continentes.
O mar não tem remorso” escreve Jabès (Jabés, 1990, p. 345).
Num mapa, faz-se dia ou noite? A sombra dos lugares parece conter todas as estações. Como Ícaros, sobrevoamos… Como então pousar os pés no chão? Provocar tremores e não temer o mundo por vir? Olhar o passado. A urgência do presente. Desejar futuros. Ler o tempo à espera do perigo, da tocaia da palavra e da esperança do relato. Esperar é um gesto. Nessa noite decretada, ler as estrelas, encontrar um continente.
Qual o seu lugar no mapa? Os nomes são destinos. Conhecer os nomes, um pedaço de terra, a fúria dos lugares. O mapa reúne a casa e o que dela nos separa; pista e plano de voo; porto e horas meridianas. Para onde leva a libertação de todo vínculo? Indaga Maldonado (Maldonado, 2004, p.32).
Quantas são as rotas de fuga? Possuir as direções. Guardar as distâncias. Abandonar o mapa. Diga, o que você viu?13
Citer cet article
Karina Dias et Luciana Ferreira, « Un jour, nous partirons : notes sur les migrations et autres distances [Um dia partiremos: anotações sobre migrações e outras distâncias] », [Plastik] : Migrations #15 [en ligne], mis en ligne le 23 avril 2025, consulté le 24 avril 2025. URL : https://plastik.univ-paris1.fr/2025/04/23/un-jour-nous-partirons-notes-sur-les-migrations-et-autres-distances/